"JYanneau" nous écrit pour nous signaler l'oubli de l'unité de précision "LE POIL DE Q"

Je voudrais vous signaler une unité de précision qui est largement en vigueur dans les bureaux d'études, il s'agit "du poil de Q", en effet l'expression "à un poil de Q près" est souvent employée pour définir une incertitude proche de ZÉRO.

Réponse de l'ENSIP :

Nous avons consulté le responsable de notre service Métrologie, qui, bien qu'étant le doyen de notre École, n'en a pas moins conservé toutes ses facultés, et nous vous livrons ici son analyse.

Pour analyser le degré d'incertitude relatif à la dimension d'un poil de Q il faut prendre en compte les données anthropologiques du poil et en déduire la problématique d'utilisation.

1) Les bases d'étude anthropologique du poil de Q :

* Les poils de Q les plus usités en métrologie se rencontrent sur les vivants environnants.

* Selon l'origine des vivants environnant les poils de Q peuvent être, droits et raides, souples et ondulés, ou frisés ou enfin crépus. On n'a pas trouvé d'influence du milieu extérieur ni de rôle sélectif de la forme des poils de Q.

* L'hérédité de la forme des poils de Q est due à plusieurs facteurs, on admet que les facteurs "poils de Q droits" ou"poils de Q crépus" sont dominants vis-à-vis du facteur "poils de Q ondulés" mais la transmission héréditaire varie selon la population considérée.

* Les poils de Q proprement dits sont plus ou moins nombreux et longs suivant le sexe, la race et les individus: un excès considérable de la pilosité conduit à l'hirsutisme.

* Les poils de Q «ambosexuels», axillaires et pubiens, apparaissent à la puberté dans les deux sexes.

* Certaines femmes sont affligées d'une hypertrichose, soit diffuse, soit d'un type androïde (ébauche de moustache et de barbe), sans qu'une cause hormonale pathologique ou thérapeutique (hormones mâles) puisse être toujours décelée. Une pilosité androïde majeure avec hypertrichose généralisée constitue le virilisme, de nature habituellement dysendocrinienne. Après la ménopause apparaissent fréquemment, sur la lèvre supérieure et sur le menton, quelques poils gros et longs, mais là, vous en conviendrez, on s'éloigne, géographiquement parlant, du poil de Q.

* Les poils de Q sont implantés dans des dépressions profondes de l'épiderme, appelées follicules. Le follicule pileux, qui contient la partie fixe du poil, au-dessous de son émergence cutanée, est une invagination épidermique dans le derme. Il comprend, de l'extérieur vers l'intérieur, un sac externe de nature conjonctive, dermique, une membrane vitrée homologue de la jonction dermo-épidermique et une gaine épithéliale externe, pluristratifiée, formée de cellules épidermiques malpighiennes.

* Le poil de Q, dans sa portion inférieure fixe («racine» du poil), adhère intimement au follicule pileux par ses gaines propres (gaine épithéliale interne); il est constitué de plusieurs assises cellulaires. L'axe du poil est formé par la «moelle», riche en graisse, et qui est absente dans les simples duvets.

* Le pôle inférieur de la racine du poil de Q est renflé en forme de bulbe et son centre (matrice épidermique) est évidé pour recevoir une expansion du derme (papille dermique) riche en nerfs et en capillaires. Au-dessus du bulbe se situe l'abouchement de la glande sébacée dans le follicule pileux.

 

fig 1 : Bulbe d'un poil de Q dont le pôle inférieur creux est occupé par la papille dermique.

 

* Au niveau de son émergence de la peau, le poil de Q devient libre, non adhérent à l'entonnoir folliculaire, et il se continue par la tige qui est la partie visible. Cette tige, plus ou moins longue et épaisse suivant les régions, perd peu à peu ses gaines, sa moelle et ses assises cellulaires, pour n'être plus formée que de cellules kératinisées anucléées. Ces lamelles de kératine dure, analogue à celle de l'ongle, sont imbriquées et contiennent de nombreux grains de mélanine qui lui donnent une couleur plus ou moins foncée.

* Au follicule pileux est annexé un muscle arrecteur, représenté par un étroit ruban de faisceaux de fibres musculaires lisses, dont la contraction détermine le hérissement (tout à fait silencieux) des poils de Q.

* La pousse du poil de Q a surtout été étudiée à propos des cheveux qui subissent des évolutions cycliques successives de croissance (phase anagène), de régression (phase catagène) et de repos (phase télogène). Cette dernière phase aboutit à la mort et à la chute du cheveu ou du poil de Q, suivies d'une nouvelle pousse. On admet très schématiquement que, chez l'adulte, 95 % des poils de Q sont en phase anagène, d'une durée de trois ans ou plus pour chaque poil de Q, 1 % en phase catagène pendant deux à trois semaines, et 4 % en phase télogène les deux à quatre mois suivants.

* La croissance des poils de Q, variable avec l'âge et les saisons, est en moyenne de 0,35 mm par jour. Mais des causes multiples, physiologiques et pathologiques, modifient cette évolution. Les hormones mâles, qui déterminent la pousse abondante des poils dits masculins (barbe, moustache), ont par contre une action inhibitrice sur la croissance des cheveux mais d'une façon surprenante pas sur celles des poils de Q, ce qui explique la fréquence des (s?)alopécies chez les hommes, ainsi que chez les femmes soumises à des hormonothérapies androgènes. L'activité sexuelle du vivant objet du prélèvement ne semble pas avoir d'influence notable sur la croissance des poils de Q.

* Un poil de Q ne tombe que deux à trois mois après sa mort spontanée ou pathologique, ce délai étant raccourci sous l'influence de facteurs mécaniques (frottis, traction, frictions, shampooings).

* Le poil de Q mort présente un bulbe plein, atrophié, blanc et sec, que l'on croit, à tort, être une «racine» non susceptible de remplacement.

* Dans l'Antiquité, on avait déjà noté que les eunuques n'étaient jamais chauves, ça n'a pas grand-chose à voir avec les poils de Q mais ça explique peut-être pourquoi le "Chef Chauve" Souris toujours.

2) Les bases de la métrologie du poil de Q :

* Les Pifométriciens qui ont bien compris les contraintes anthropologiques inhérentes au poil de Q limiteront donc les prélèvements sur les vivants environnants de sexe masculin à poil droit et brun ou noir (les poils de Q blonds ou roux sont beaucoup plus difficiles à manipuler car, en général, beaucoup trop flexibles pour êtres introduits facilement dans l'espace à évaluer "au poil de Q près").

* Les microphotographies de poils de Q réalisées dans le laboratoire de l'ENSIP démontrent que celui-ci n'est ni rond ni cylindrique (c.f. la figure 2 ci-dessous).

fig 2 :Coupe transversale d'un follicule pileux centré par un poil de Q. -

poil 2

* Le poil de Q peut être utilisé pendant un mois environ après le prélèvement sur un vivant environnant et il conviendra de marquer le plan de jauge à au moins 3 mm de l'extrémité du bulbe extrait de la papille dermique (voir figure 1).

On retiendra enfin avec intérêt que le diamètre moyen d'un poil de Q du type "poil droit" prélevé sur un technicien (volontaire, mâle au système pileux normal, brun et adulte) a été mesuré à 120 µm "au plan de jauge" avec des moyens de mesures sans contact à une température ambiante de 20° Celsius et une humidité de 55 % dans le laboratoire de métrologie de l'ENSIP.